dimanche 11 novembre 2018

27 Février 1916 (Journal de Guerre de Louis Testot 44°RIT)

27 Février 1916

Les positions de nos Cies ne changent pas.
A signaler l'arrivée de la cie de Mitrailleuse Chagneau qui occupera dans la soirée l'emplacement suivant : 
I section près l'abri VILL
I section sur les pentes à l'Ouest de Damloup
I section au croisement des routes de la Laufée-Vaux ; cette dernière retirée le lendemain, à cause d'un bombardement, rentre au Tunnel de Tavannes.
la 4° section reste au Tunnel.
Nos Cies demeurent dans les tranchées sur la défensive tandis que l'ordre est donné à des troupes actives de reprendre le terrain perdu dans la Woëvre. Le 174° RI est chargé d'opérer dans le rectangle compris entre la route d'Etain au Sud, la route de Vaux à Dieppe au Nord, Damloup et le bas des c^tes à l'Ouest, la ligne fermée par la station d'Eix, Souppleville, Nobra, à l'Est.
La 28° Brigade a pour mission de lancer une section du 42° A (Bat. Lavalette) dans le bois Feuilla pour éclairer le 174°. Cette opération ne doit commencer qu'à la fin du jour.
Ces ordres correspondent à des modifications importantes dans le commandement de la région qui se subdivisera en, trois secteurs :


Le secteur Pellachi-95° Brigade au Sud
Le secteur Lacotte 28° Brigade au Centre
Le secteur Gorot 27° Brigade au Nord.
Le bombardement est plus intense que jamais pendant toute la journée.On ne signale que du gros calibre : 150, 210, des obus de 280 et même de 420 tombent sur les forts de Vaux et de la Laufée. 
Dans le compte-rendu du 1er Bataillon (Cdt Bauer) on lit :
"27 février, 18h20 l'ouvage de la Laufée a été bombardé de 14h25 à 16h25 l'objectif était la tourelle qui ne s'éclipse plus. Un obus a crevé le fort partie Sud. Les artilleurs qui étaient à l'ouvrage ont reçu l'ordre d'évacuer."

Les oeuvres vives des deux forts sont atteintes et détruites. Mais il n'y a pas de pertes sérieuses grâce à la mesure préalable d'évacuation : quelques abris bousculés çà et là ; quelques blessés, mais peu nombreux.
Damloup est aussi bombardé systématiquement toute la journée. L'abri VLL est lui-même fort menacé à cause du voisinage de la batterie de 95 qui est nettement repérée par l'ennemi.
On apprécie le bombardement que nous avons subi de 8h du matin à 8h du soir, par sa cadence, qui est d'un obus au moins à la seconde. 40 ou 50.000 (cinquante mille) obus environ ont été tirés dans la journée.

La nuit est moins bruyante. Les nouvelles des opérations préparées ne nous  parviennent qu'au matin.

Pertes du 27 Février 5 blessés I disparu. 

Moi Didier TESTOT arrière-petit fils de Louis TESTOT et de Joseph Cibiale

En ce jour du 11 novembre 2018,
100 ans après la fin de cette Guerre marquant pour l'Histoire de l'Europe, de la France et du Monde, j'ai décidé de publier de journal de Guerre de mon arrière grand-père Louis TESTOT, Adjudant Secrétaire du Lt Colonel Cdt le 44° RIT qui s'est battu à Verdun.

Nous sommes tous nous Français concernés par ce qui s'est passé en 1914, par respect pour tous ceux qui ont combattu, tous ceux qui sont morts ou disparus lors de cette Guerre. 
Tous nos villages portent les souvenirs de ceux qui y étaient. Nos monuments sont là pour nous le rappeler.
Plus le temps passe, plus il sera difficile sans doute de faire perdurer cette mémoire collective, même si elle est dans notre sang.

Le témoignage de mon arrière grand-père est édifiant sur ce qui se passait sur place, témoin de cette force humaine pour résister à de tels cataclysmes. 
"Un obus par seconde", 40 à 50.000 obus par jour..." écrit mon arrière grand-père. Ces chiffres m'ont effaré.

Comment peut-on survivre à ces chocs ? Comment un tel déchainement de violences est-il possible ?
Le 44° RIT dit Régiment de Verdun, composé de meusiens et de parisiens a tenu le front des 1ers jours d'août 1914 au 4 mars 1916 (avant d'être envoyé sur la voie Sacrée, sans désemparer.
Développé sur un front de 3 km en 1ère ligne le 21/2/1916 entre Fromezey, le bois des Hautes Charrières et l'étang de Braux, devant Dieppe, la erme Haraigne et Damloup, eux-mêmes devant les forts de Douaumont et de Vaux, ce régiment a supporté les préliminaires de l'offensive allemande du 26/2/19 à 7 heures du matin.
Malgré le recul stratégique ordonné par le commandement, le point culminant de ces journées est situé le 27/2/1916 ou le régiment a supporté de 8 heures du matin à 8 heures du soir un bombardement allemand d'obus de tous calibres de plus d'un obus par second soit 45.000 à 50.000 obus.
Pendant cette période, du 21 au 4, ce seul régiment n'a enregistré "que" 49 morts, 169 blessés et 86 disparus surtout le 25/2 ou les éléments à l'avant n'ont pu être prévenus, par manque de possibilités, du recul ordonné, peut-être ont-ils pour la plupart fait prisonniers.

100 ans après ce sacrifice humain, d'une génération, ne doit pas être sujet à polémiques de bas étages. Car toute civilisation qui ne respecte pas ses morts est vouée à disparaître.

Nous devons toujours penser à eux, pas pour ne pas avancer, mais au contraire pour que les sacrifices de ceux qui y étaient ne nous amènent jamais à recommencer car nous en connaissons le prix.
Liberté Egalité Fraternité oui nous leurs devons notre Liberté, celle qui en 2018 dans le Monde, nous le voyons bien est menacée car l'Histoire a cela de pathétique, elle se répète trop souvent, parce que les hommes oublient leur histoire, celle de leurs ancêtres.

Si mon arrière grand-père paternel était à Verdun, mon autre arrière grand-père Joseph Cibiale y était aussi, il était dans le 34ème Régiment d'infanterie de Mont de Marsan (Landes), crée en 1625.
Blessé le 23 mai 1916 au Fort de Douaumont par un éclat d'obus. Il était Caporal. Il fut évacué le 25 mai 1916 à Toul (Est de la France)

Sans le savoir Joseph Cibiale était lui aussi sur ce terrain de Verdun, la même année que Louis Testot (classe militaire 1897)
Croix de Guerre 8 mai 1916
Sergent puis Adjudant
164° Régiment d'infanterie (44RIT)
Appelé bien après son service militaire, le 1er août 1914, arrivé au corps le 2/8/1914
Citations : Blessé au nez par éclat d'obus pendant le bombardement du Fort de Douaumont le 8 octobre 1914
Décoration Croix de Guerre N°39 de la 212° Brigade du 24 mai 1916

Deux arrières grand-pères à Verdun, combien de familles françaises sont aussi dans ce cas. Pour leur courage et ce qu'ils ont vécu, nous leur devons un respect éternel.

J'espère que jamais nous n'arrêterons de transmettre cela aux générations futures, c'est une question fondamentale. 

Didier TESTOT







ANNEXE Journal de Guerre de Louis TESTOT (44° R.I.T)

Compte rendu du Cdt Robin (3° Bataillon 44° RIT)
Le 24 février 1916 au Lt Colonel Cdt le 44° RIT centre de Fromezey

"J'ai l'honneur de vous rendre compte de notre situation.
Il n'existe plus de tranchées 2 et 3 et le réseau Est présente de nombreuses et larges brèches.
En ce moment le bombardement systématique de démolition sur tranchées 6 et 7 et réseaux se reproduit.
L'on peut dire qu'il n'y a plus de défense ou si peu !
La tranchée 23 de même que le réseau Nord en face sont démolis également
Nous ferons l'impossible mais il ne faut compter que sur nous, avec notre coeur tout entier
Le Chef de Bataillon
signé Robin
24/2/1916
Le tir de démolition continue devient comme un terrain uni, l'on ne peut y circuler sans être vu de tous côtés
Je fais l'impossible pour réparer mais cela devient un travail presque surhumain"



Mars 1916 (Journal de Guerre de Louis Testot 44° RIT)

Mars 1916


1er MARS 1916

Accalmie dans le secteur
Dans l'après-midi arrive l'ordre de relève de la 14° D.I. par la 120° D.I.; l'opération doit durer deux jours.
En ce qui concerne le 44° RIT relevé dans la nuit par la 408°Actif il a l'ordre de se rendre à la caserne Bévaux.
La relève pour le 1er et le 2° Bataillon s'opère dans le courant de la nuit du 1er au 2 mars.

2 MARS 1916

Zone de regroupement pour la 212° Brigade E.M. Belrupt
45° et 36° - d°-
44° Bévaux, quartier Villars, près le quartier Treuil de Beaulieu.
Seul le 2° Bataillon est au quartier Bévaux avec l'Etat Major du Régiment ; le 1er et le 3° Bataillon Magasin à fourrages.
Le 3° Bataillon ne sera relevé que ce soir. La 3° Cie posté à l'ouvrage d'Eix n'est pas encore relevée.
Le Train Régimentaire est toujours à Senoncourt.

3 MARS 1916

Le 3° Bataillon arrive à Bévaux (fourrages) à 3 heures du Matin.
La 3° Cie relevée par un élément du 38° A. arrive à Bévaux à 17 heures.
à 20 heures, le 44° RIT reçoit l'ordre de partir dans la nuit pour aller cantonner dans les péniches stationnées au Sud de la passerelle d'Houdainville.


4 MARS 1916

Le Régiment quitte le quartier de Bévaux à 0h30. Il arrive aux péniches et s'y installe à 2H50
Lecture est faite dans la journée à toutes les unités de l'ordre n° 90 du 20° Corps d'Armée
"Le Président de la République et le Général en Chef sont venus personnellement exprimer au 20° C.A. leur haute satisfaction. Ils l'ont remercié d'avoir, grâce à son esprit éprouvé de sacrifice, complètement rétabli une situation périlleuse.
Le Général Cdt le 20° C.A. est fier de pouvoir transmettre ses félicitations aux Régiments du C.A. ainsi qu'à ceux des 2ème et 14° Divisions qui lui ont donné sans compter leur concours si précieux.
Quand on sait faire tout son devoir, on obtient toujours la récompense du succès".
P.O. le Général de Division
Balfourier en date du 1er Mars 1916.

Relevé des pertes
29 févreir 3 tués ; 8 blessés
1er mars 4 blessé, I disparu
2 mars I tué 12 blessés I disparu.




Pour copie conforme : TESTOT
Adjudant Secrétaire du Lt Colonel Cdt le 44° R.I.T






29 Février 1916 (Journal de Guerre de Louis Testot 44°RIT)

29 février 1916

Journée relativement calme. Nous n'avons à signaler comme modification aux positions de nos Cies que les suivantes :
La 9° Xie est à Dicourt, à la disposition du Cdt Lavalette du 42°A. (ordre de la Brigade N° 114/05)
La 10° Cie est à la mahcine élévatoire près du Tunnel
la 12° Cie est à Damloup.

A 8 heures du matin la Brigade (28°) adresse cette note de service au Cdt du 44° RIT
"Si la situation actuelle se poursuit dans les mêmes conditions tous les éléments en position prendront les dispositions pour se munir des outils nécessaires poru exécuter les travaux suivants :
relier entre elles par des boyaux convenablement étudiés et piquetés les différentes tranchées de façon à pouvoir se rendre à couvert de l'une à l'autre sur chaque ligne et entre les lignes.
Les boyaux descendant des positions les plus rapprochées des sommets devront être défilés des coups au moyen d'un tracé convenable.
Dans chaque section, les Officiers étudieront un plan d'exécution du travail destiné à relier leurs troupes avec la plus voisine tant à droite et à gauche qu'en avant et en arrière.
Il est bien entendu que ce travail ne peut être effectué qu'entre la tombée du jour et la nuit / P.O. le Cap. d'Etat Major Ulrich."


28 Février 1916 (Journal de Guerre de Louis Testot 44°RIT)

28 Février 1916

8h 1/2 du matin le Colonel Pellachi fait une visite au Gal Lacotte établissant ainsi une liaison très étroite entre secteurs (secteur Sud 95° et 28° Brigade) Il a installé son P.C. à l'abri de la batterie du Mardi-Gras (route d'Etain). 
Le Colonel du 174° RI qui dépend de lui, a sous ses ordres une de nos Cies, la 3°, qui après avoir protégé à la sortie Est de Dieppe dans la matinée du 25 la retraite de la 28° Brigade a dû gagner l'ouvrage d'Eix, et coupe depuis toutes les tranchées du ravin d'Eix.
L'attaque de l'infanterie allemande par l'Est semble gênée non seulement par notre artillerie qui canonne continuellement les points d'écoulements précités, mais aussi par l'initiative de notre propre infanterie.
Le 44° RIT collabore avec les troupes actives dans l'affaire du bois Feuilla et la défense de Damloup.
Le bois est occupé- sa lisière Sud au moins- par nos troupes actives, mais cannoné par les allemands.
Damloup n'est d'abord défendu que par une Cie d'Active, la pression des allemands va obliger le commandement à renforcer la garnison à l'aide du 44°RIT. Une forte reconnaissance allemande venue dans la matinée jusqu'à nos réseaux se laisse surprendre par une patrouille envoyée de Damloup par le Colonel Engelhard. Cette patrouille est commandée par le Lt Lebret : elle tue une cinquantaine d'ennemis et fait environ autant de prisonniers.
L'après-midi, relativement plus calme que les précédentes est occupée à l'abri de Damloup (VLLI) par l'interrogatoire des prisonniers
C'est à ce moment, que nous avons à déplorer la blessure du Lt Colonel Cdt le Régiment de Senilhes, frappé au bras d'un éclat d'obus à proximité de l'abri, en même temps que celle du Capitaine Dolfus, Officier d'ordonnance du Général Lacotte. Le Lt Colonel ainsi que cet officier sont évacués le soir même à 21 heures.
Le Cdt Boulanger, du 2° Bataillon, prend aussitôt le commandement du 44° RIT, et le Capitaine Gay celui du 2° Bataillon.
Ce qui préoccupe le commandement de la 28° Brigade, c'est avant tout l'organisation de la défense.

Deux mesures sont prises à 17 heures. 
La première mesure consiste dans le renforcement de la garnison de Damloup, et la Ière Cie du 44° RIT reçoit l'ordre d'aller rejoindre au village la XI Cie (Lebret) du 42° Actif. 

Note de la 28° Brigade du 28 février :"Bien prévenir qui de droit que sous aucun prétexte la garnison de Damloup ne pourra se replier. Ce village et ses abords sont à tenir à outrance comme d'ailleurs tout le reste du secteur (notifié à Lieut. Darras Cdt ma 12° Cie)"
L'opération s'effectue à la tombée de lanuit.
La second mesure proprement technique est confiée au Lieut. Cdt la 7°/I du Génie (Lt Tournait) et au Lieut. Fizeller Cdt les Sapeurs pionniers du 44° RIT, auxquels on adjoint pour transporter du matériel pendant le nuit du 28 au 29, la 9° Cie 44° RIT (Cap. Gazier) : mise en état de défense du village de Damloup et du bois Feuilla.

Pertes/ 4 blessés. I Disparu





samedi 10 novembre 2018

26 Février 1916 (Journal de Guerre Louis TESTOT (44°RIT)

26 FEVRIER

À 7h30, conformément à l'ordre 103/05 de la Division, le train règimentaire quitte chevert pour se rendre à Senoncourt. Le train de combat et les cuisines roulantes s'installent dans une carrière défilée le long de la route de Bellevue à Souville.
Le Lt Colonel et son P.C. dans l'ouvrage VLL I, situé entre le Fort de Vaux au Nord et celui de la Laufée au Sud.
C'est là que se trouvent réunis, le 26, au matin, l'Etat Major de la 28° Brigade (Gal Lacotte) qu'accompagne le Colonel Bertrand (212° Brigade) et l'Etat-Major du Colonel Engelhard Cdt le 42°A. qui, depuis qu'il s'est replié de Dieppe sur les Hauts de Meuse occupe une des casemates d'un abri d'artillerie.
La situation générale parait d'abord fort précaire. L'ennemi qui déborde par le Nord et l'Est, et s'est rendu maître de notre première ligne de défense, avant d'aborder la seconde ligne, c'est à dire celle des Forts, commence à exécuter sur ceux-ci un bombardement intense et continu tel que Fromezey et Haraigne l'ont subi.
Les forts sont évacués, conformément à une note de la 28° Brigade du 26/2/16-14 h5, dans laquelle le Gal Lacotte écrit au Colonel de Senilhes "il faut de toute nécessité que, dès que ce mouvement pourra se faire, vous ne laissiez dans le fort de Vaux qu'une Cie de Réservé, les 3 autres Cies garnissant les ouvrages situés sur les pentes Nord et Nord Est de la croupe de Vaux, sans toutefois avoir plus d'un homme sur deux mètres courant..."

Disposition des troupes

Le 1er Bataillon (Cdt Bauer) face à l'Est et au Sud, en arrière du bataillon du 42°A (Cdt Lavallette) qui occupe la première ligne le long de la route d'Eix à Abaucourt, se répand dans les tranchées de 2ème ligne qui dominent les fermes de Dicourt et de Bourvaux.

Les Cies du 2° Bataillon (Cdt Boulanger) occupent les tranchées qui surveillent la plaine depuis le ravin de Vaux jusqu'à Damloup. Elles se trouvent placées en arrière de la première ligne défendue par le Bataillon actif du Cdt Latour, dont le secteur a pour limite la route qui longe le cimetière de Vaux.
Le 3ème Bataillon demeure en réserve dans le tunnel de Tavannes.
Le village de Damloup est occupé par la XI° du 42° A. commandé par le Lt Lebret. La Cie de Mitrailleuse du 44° RIT, arrive au fort de Vaux à 3 heures du matin, occupe dans la journée l'emplacement suivant :
I section au S.O de la Laufée
I section au fort de Vaux (ravin)
I section au S.O. de Damloup
Sections de position N°317 et 319 : pentes N.O. du fort de Vaux.

Evénements

Les événements dans l'après-midi se précipitent. Quelque intense que soit le bombardement par l'Est, l'attaque la plus redoutable est visiblement par le Nord ; l'ennemi débordant par les Caurières, les Chambrettes et la cote 378 descend sur Douaumont.
Le bruit court que ce fort serait pris, ainsi que l'ouvrage d'Hardaumont. nous pouvons craindre un moment, si l'ennemi se glisse par le couloir de Fleury à Vaux, d'être cernés. On sait que le village de Vaux, doit être occupé par le Colonel Gerst Cdt le 44° ACTIF. Une liaison très serré s'établit avec lui.
Vers le soir, on se rassure, le village et ses deux versants sont bien à nous le Lt Colonel de Senilhes y descend et s'en assure en personne. Les chefs de Bataillon rendent compte des points précis occupés par eu au Nord-Est et à l'Est, sur les hauteurs de Vaux et Damloup.
La nuit est consacrée à une liason active entre les unités, en conformité avec l'ordre du Gal Lacotte (Cdt 28° Brigade), adressé au Lt Colonel Cdt le 44° RIT 26/2/16 à 18 heures.
"Il est absolument nécessaire que toute la nuit, les Bataillons des forts de Vaux et de Laufée se tiennent par de petits postes et des patrouilles en relation constante avec les Cies de G.G. du 42° Actif de notre première position ; il faut aussi que le Bataillon du Fort de Vaux se couvre sur sa gauche pour se méfier de la coulé vers l'Ouest de Vaux, et que le Bataillon de la Laufée se couvre sur sa droite notamment vers la ferme Bourvaux et la route d'Etain.
Il faut un entente entre ces chefs de Bataillons et les Cdts des Cies de G.G. de la première position.
Enfin il faut que le Bataillon Robin, tout en étant de réserve, se couvre pour se tenir au courant de tout ce qui peut se passer."

L'ennemi ne cesse de déboucher depuis 24 heures par petits paquets venant de l'Est : Abaucourt, Haraigne, la sortie Ouest de Dieppe, sont les points d'où les Allemands se répandent sur le Nobra, Souppleville, le Grand et le Petit Feuilla et le remblai du chemin de fer Meusien.
Notre artillerie qui vise tous ces points réussit à ralentir l'infiltration ennemie, mais elle a beau riposter activement au bombardement de son adversaire, elle ne peut contrebattre les batteries d'artillerie lourdes qui portent plus loin qu'elle et sont hors de son atteinte.

PERTES du 26 Février : 20 blessés, I disparu

25 février 1916 (Journal de Guerre Louis Testot 44° RIT)

25 février 1916
Le Lieutenant Colonel veillait à l'exécution des travaux quant, à I heure du matin, il reçut l'ordre suivant : mention tres urgent
Au Lt colonel de senilhes Cdt le 44° RIT.
"La XI° Division a l'ordre de se replier sur les Cotes de Meuse, de Bezenvaux inclus à Eix inclus. Ce mouvement de repli s'effectuera dans les conditions suivantes :










I° les réserves de Division garniront les ouvrages du bas des Côtes de Meuse, savoir les Cies du 42° A et les unités du 44°RIT à Damloup, le Bataillon du 35° à Eix.
2° Le repli des garnisons des centres de Braux, des Htes charrières et de Fromezey s'effectuera dès réception du présent ordre.
La garnison des centres de Braux par Dieppe et Damloup et la Fiéveterie sur les environ du Fort de Tavannes.
Les garnisons des Htes Charrières se replieront par Haraigne et Abaucourt et la Fiéveterie sur les abords du Fort de Tavannes.
Le Gal Lacotte se portera à Damloup où il restera jusqu'à nouvel ordre. Le Gal de Division sera à partir de 5 heures du matin aux baraquements de Seuville.
On emmènera tout le matériel. celui qui ne pourra être emmené sera détruit."
L'ordre est aussitôt transmis par des coureurs au chefs des différents centres, et vers 2 heures du matin, le mouvement de repli commence de la manière suivante :
I° les Cies de l'active ont reçu l'ordre de leur chef de bataillon de se replier suivant l'itinéraire fixé par leur chef de corps. Elles partent les premières.
Les Cies de Réserve du 44RIT des Htes Charrières, par des vois défilées, se dirigent sur Haraigne suivies des Cies de G.G qui ferment l'arrière-garde.
À Dieppe Est, La 3° Cie du 44° RIT, à 2 heures du matin, reçoit l'ordre de rester à son poste pour protéger la retraite, elle ne recevra l'ordre de se replier qu'à 13h30 après avoir subi le choc des premières vagues d'infanterie allemande dont l'attaque se déclenchera à 7 heures du matin.
À 2 heures, le Gal Lacotte adressait au Lt Colonel de Senilhes la note qui suit : 
"Il est bien entendu que vous vous occupez de tous les éléments actifs et territoriaux qui composent votre groupement."
Le Lt Colonel s'assure par lui-même jusqu'à 3H 1/2 que l'évacuation de la Ferme Haraigne, en personnel et en matériel s'effectue normalement et que les troupes des Htes Charrières s'écoulent sans trop de difficultés par le boyau, malgré le tir de barrage que l'artillerie ennemie ne cesse de diriger sur ses deux issues. Le matériel qu'on ne peut évacuer est détruit, les documents intéressant la défense sont emportés, tous les papiers indiscrets brûlés, les fils téléphoniques rompus.
A 3h 1/2 le Lt Colonel confie au Cap. Gay Cdt du Centre d'Haraigne, le soin de diriger à 4 heures, la retraite de sa garnison. Un peloton du 42°A restera posté à Haraigne pour ralentir l'élan de l'attaque ennemie.
Le Lt Colonel se rend à Abaucourt pour guetter le passage des premiers éléments de la garnison de Fromezey.
Après s'être rendu compte que le mouvement général de repli s'effectuait en ordre, sans éveiller les soupçons de l'ennemi, le Lt Colonel de Senilhes se rend aux environs du Fort de Tavannes, où il arrive vers 6 H du matin.
Une heure après, la plupart des Cies étaient rassemblées, les hommes allument des feux et font le café. Une atmosphère brumeuse et quelques bourrasques de neige avaient favorisé ce repli stratégique.
On a, heureusement, peu d'accident à relater. Mais il est regrettable que probablement par suite d'un manque de transmission de l'ordre de repli, quelques postes manquent à l'appel, celui qui occupait la tranchée 23, commandé par I sergent de la 10° Cie, et comprenant 6 hommes, et ceux de la tranchée 4 comprenant I sergent de la 2° Cie, un caporal, et 9 hommes, de la tranchée 6 comprenant un caporal et 6 hommes de la tranchée 7 : I caporal et 4 hommes, de la tranchée 8 comprenant I sergent, I caporal et 9 hommes, tous de la 2° Compagnie.
Entre 7 heures et 8 heures, tandis que l'arrière garde de la 14° Division faisait le coup de feu contre les premières patrouilles d'éclaireurs ennemis, le Régiment (44°RIT) reçoit l'ordre de se rendre à la caserne Chevert, conformément à l'instruction de la 212° Brigade en date du 25 février 1916. Il y prend dans la journée quelque repos.
Malgré l'extrême fatigue des hommes qui revenaient des A.P et avaient tenu pendant 92 heures sous un bombardement formidable, l'ordre vient, à 20 heures, de ramener les trois bataillons sur les Hauts de Meuse menacés par les Allemands.
Le Régiment quitte la caserne Chevert à 21 Heures, avec le Lt Colonel. Le Ier Bataillon reçoit comme point de direction le fort de Laufée,
Le 2° Bataillon va au Fort de Vaux
Le 3° Bataillon rejoint le Tunnel de Tavannes.
A noter que la 3° Cie - retour de Dieppe va occuper l'ouvrage d'Eix, en liaison avec le Cdt Marotte du 174° ; elle y relève une Cie du 87°.
La Cie de Mitrailleuses Brunhold (44°RIT) part de Chevert à 21h30 et se rend au Fort de Vaux la Cie de Mitrailleuses de la Brigade (Lt Chagnon) 544°RIT) reste à Chevert jusqu'à nouvel ordre.

PERTES pour le 24 février 7 tués, 13 blessés
le 25 février : I tué, 10 blessés et 78 disparus.



24 février 1916 (Journal de Guerre de Louis TESTOT 44°RIT)

24 février 1916

Position des Troupes.

Une seule modification à constater ce jour-là, c'est la relève à la GG3 (Htes charrières Nord) de la 6° Cie par la 2°Cie (à 19H). La 6° vient remplacer la 2° au réduit des Htes Charrières.
Evénements : à 7 heures du matin, on peut compter que le bombardement dure depuis environ 72 heures. Des pertes sont, heureusement peu considérables, à mettre en balance avec la formidable activité de l'artillerie ennemie. tous aspirent à ce que l'attaque de l'infanterie se déclenche et que le bombardement cesse.
Dans la matinée il reprend avec la même intensité que la veille et c'est avec plus d'insistance que tous les Cdts des centres demandent que notre artillerie contrebatte l'artillerie ennemie, cela sera d'un excellent effet sur nos troupes de voir Etain, Foameix, Gonomoulon, Gincrey et les bois de Tilly de Béhant, du Penar bombardés. Ce qui atteste l'énervement de quelques uns de nos hommes c'est une étrange rumeur qui circule à la GG3 que des bruits de sape seraient entendus au fond d'un abri. Le Commandant décide d'envoyer un sapeur technicien pour faire les sondages désirés et rassurer les esprits.
Fromezey que l'ennemi vise particulièrement sans relâche ne présente plus vers 13h de ressources pour la défensive; il n'y a plus rien des réseaux et les tranchées sont bouleversées. Plus un pan de mur dans le village.
Le Cdt Robin s'exprime ainsi "Fromezey devient comme un terrain uni"

À 14H45 il y a à déplorer un nouvel accident : l'abri 6 est culbuté. Le Cdt laisse entendre qu'il y aurait plusieurs morts et plusieurs blessés.
dès qu'il apprend cette nouvelle le Gal de Brigade envoie à Haraigne un Officier d'Etat-Major, le Lt Olive, pour recevoir de vive voix du Lt Colonel lui même ses impressions sur la situation. Le Lt colonel ne cache pas ses préoccupations particulièrement au sujet du centre de Fromezey, mais il conclut que la garnison peut tenir comme elle le doit. Il fait seulement demander au Général la faveur de quitter cette nuit son poste de Commandement d'Haraigne pour se rendre auprès des défenseurs de Fromezey; le Général lui répondra une heure après qu'il ne peut faire droit à sa demande, mais l'invite à préparer avec plus d'activité encore s'il est possible le ravitaillement en matériel des ventes les plus menacés.





23 Février 1916 - Position des Troupes (Louis Testot 44ème RIT)

23 Février 1916 - Position des Troupes :
Modification d'ordre général. Conformément à une instruction du Général Lacotte du 23 Février, IIh20, le Centre de Braux est détaché du secteur d'Haraigne.
"Le Lt Colonel de Senlihes conserve le commandement de la zône d'Haraigne, Htes Charrières, Fromezey y compris l'ouvrage 5. Le Lt Colonel Engelhard prend seul sous son commandement toutes les troupes stationnées dans Dieppe et dans la zône située au Nord de la lisière Nord des Htes Charrières à l'exclusionde l'ouvrage 5.
Modifications particulières- À la GGI Fromezey.. La 4 Cie relève la 8°Cie qui part pour Damloup.
A la GG2 (Htes Charrières Sud), la 9° Cie relève la 7° Cie.
Au Réduit- Deux Cies de l'active y tiennent garnison.
Evénement : La journée se caractérise par un bombardement de démolition de plus en plus systématique avec activité plus violente sur Braux et Fromezey.
À Braux à 7h, 10h et toute la journée le Cdt Bauer signale un tir de destruction avec gros calibre.L'abri de la Tranchée 43 bis est défoncé. A la fin du jour, le P.C. de la GG4 est en partie détruit.
Aux Htes Charrières, le Cdt Boulanger signale que la journée a été plus calme que les deux précédentes ; l'avancée Est est moins bombardée. Tir lent et continue avec rafales sur lisière N.E, Réduit et digue d'Haraigne. La nuit est également plus calme. Des patrouilles allemandes ont tenté de s'approcher, l'une d'elles, vers 20 heures, a coupé environ 2 mètres de réseaux en face du boqueteau ; un feu de salve l'a dispersée, la brêche a été relevée.
Ordre SP 43 du Général Lacotte. 
"Si des fractions ennemies venaient à pénétrer de nuit dans les lisières du bois, les patrouilles qui réussiront à faire des prisonniers, seraient récompensée d'une façon spéciale en raison de l'importance des renseignements que les prisonniers pourraient fournir"
Entre le Bois et Fromezey, et à Fromezey même le bombardement demeure intense. A 8H 55 des obus de 280 tombent sur Fromezey. Et l'abri de la Tranchée 2 s'écroule, il y avait 60 hommes dedans, on ne signale que 10 morts et 4 blessés (tous de la 8° Cie). A 10h30 le Général envoie des sapeurs pour aider au sauvetage. À la même heure, le Colonel demande au Cdt Robin : Est ce un tir continu ou sur rafales ? Le Cdt répond : c'est un tir continue de destruction systématique".
Haraigne subit en même temps un tir de démolition avec gros calibre. Entre Haraigne et Fromezey et sur le boyau, l'ennemi exécute de perpétuels tirs de barrage. La ferme Haraigne, vers Midi, est écrasée d'obus de gros calibre. 
Le grand abri est particulièrement visé. L'après-midi est tout aussi actifvé de ce côté-là. A 13h40, le Cap. Gazier bien que son observatoire soit détruit signale une batterie de 210 au bois de Tilly, des 105 derrière Faomeix et le moulin d'Etain. Il demande à notre artillerie de contrebattre l'adversaire. C'est la demande réitérée des centres et particulièrement ceux de Braux et de Fromezey.
À 15 heures, la relève de la 8° Cie est décidée pour le soir ; elle sera remplacée à Fromezey par la 4° Cie. Elle ira à Damloup en réserve de Division.
À 15h35, le Général Lacotte envoie un message de félicitation au 44° RIT; il est transmis à tous les centres.
"Le Général Lacotte Cdt la 28° Brigade a chargé le Colonel Cdt la 212° Brigade d'adresser aux officiers, S/officiers caporaux et soldats du 44° RIT ses plus vives félicitations et son témoignage de reconnaissance pour la façon digne de tous éloges dont ils ont supporté depuis 48 heures le bombardement le plus intense, en conservant, malgré tout un moral remarquable".
Le Général demande un état de propositions de récompenses et un été des pertes.
À 15h45 le Cdt Robin signale un tir de démolition très intense sur le réseau entre la Tavanne et la route d'Etain, qui indique chez l'ennemi l'intention de faire une brêche pour passer. Il signale encore à 8h30 un tir de même espèce sur le réseau entre Fromezey et les Htes Charrières. Il ne pourra faire occuper cette nuit , mais une patrouille circulera toute la nuit le long du réseau. Il s'entend avec le Cap. Gazier (9°Cie) pour la liaison avec le 17 bis.
La nuit ramène une certaine accalmie. 
Suivent ci-dessous les dispositions à prendre en cas d'attaque conformément à l'instruction tactique du Gal Cdt la 28° Brigade en date de ce jour : 
"Les Cies de Réserve du Réduit se préparent à garnir les lisières l'une face à la route de Abaucourt-Etain, l'autre face à l'étang de Braux, de manière à prendre en flanc l'assaillant qui s'écoulerait le long des lisières entre les Htes Charrières et Fromezey d'une part et d'autre part entre les Htes Charrières et l'étang de Braux.
"Une Cie de Réserve du du Réduit se préparent à garnir les lisières l'une face à la route Abaucourt-Etain, l'autre face à l'étang de Braux, de manière à prendre en flanc l'assaillant qui s'écoulerait le long des lisières entre les Htes Charrières et Fromezey d'une part, et d'autre part entre les Htes Charrières et l'étang de Braux.
"Une Cie d'Haraigne se porte par la Tavanne pour boucher le couloir Htes Charrières-Fromezey, mais de façon à ne pas gêner les feux de flanc des Cies portées sur les lisières.
Une Cie de Dieppe se porte sur le front Haraigne-Etang de Braux dans la même but de façon à boucher le couloir Htes Charrières, Etang de Braux tout en laissant libre le terrain battu par les feux des éléments qui garnissent les lisières Nord et Nord-Ouest est Htes Charrières.
"Une 2ème Cie de Dieppe se rapproche du Bois de Braux, autant que possible à couvert des vues, de ce bois, de manière à contre-attaquer tout adversaire qui voudrait s'infiltrer vers Dieppe par la vallée du ruisseau de Vaux"
   
Observation importante ; à faire connaître à tous les hommes, les cadres s'assurant de l'exécution.
"Le Gal Cdt la Divsion recommande expressément que pendant la durée du Trommelfeuer les hommes restent couchés derrière leurs abris, de façon à être aussi indemnes que possible des effets du bombardement. Dès que ce bombardement cesse ou même dans les intervalles de silence, les hommes se redressent et sont instantanément à leur poste le fusil prêt"

Travaux. Les travaux se poursuivent activement dans tous les centres grâce à la collaboration des équipes du Génie commandée par le Lieutenant Tournait des S.P. du 44°RIT. Mais à Braux et encore plus à Fromezey, la tâche des travailleurs devient presque insurmontable, en déît de la bonne volonté des hommes et de l'abondance de matériel mis à leur disposition.
A 6 heures du matin, le Lt colonel demande au sergent du Génie préposé aux magasin d'Haraigne, de faire en sorte que la voiture de matérie soit à 20 heures à Fromezey. Elle doit y transporter des piquets, des fuseaux de fil barbelé arrivés la nuit précédente. L'Adjudant Bouché de la CHR est spécialement demandé à Damloup pour diriger un autre convoi de même genre. Une voiture envoyée par la Division porte auss dans les différents centres les fusées nécessaires aux signaux.
Une partie du plan de réfection sexécute plus aisément aux Htes Charrières, plus difficielemnt à Braux et surtout à Fromezey.
Le Cdt Boulanger rendra comptez dans la matinée du 24 février que l'on a pu réparer les brêches des réseaux du bois pendant la nuit. 
Mais à Fromezey si l'on peut entretenir tant bien que mal une banquette de tir de 15 mètres à la tranchée 23 il est presque impossible de réparer les réseaux, on tire tout le parti possible des réseaux Brun apportés.
Ravitaillement- Additif de la Brigade, en date de ce jour, à l'ordre 94/25 de la Division :
"Dans les circonstances actuelles, bien veiller à la nourriture des hommes et leur donner si possible du vin."
Le ravitaillement s'effectue avec plus de régularité. Après avoir dû consommer pendant un jour et demi des vivres de conserve, les hommes ravitaillés en viande, en pain, en café, peuvent avoir, bien qu'à des heures irrégulières, de la soupe, une boisson chaude. En tous cas, les voitures arrivent ponctuellement à Braux comme à Fromezey. Quant aux troupes restées dans le bois, elles viennent se ravitailler la nuit à Haraigne et les vivres sont transportés dans les tranchées à dos d'hommes.
Pertes : 9 tués- 32 blessés après révision : 17 TUÉS, 49 BLESSÉS 2 DISPARUS








22 février 1916 (Extrait du journal de Guerre du 44° RIT) de Louis TESTOT

22 Février 1916

22 Février 1916- La disposition de nos troupes est la même que la veille, mais renforcée comme il a été dit.
Evénements. A 1h30 du matin, le Lt Colonel concoqué au P.C. de la 28° Brigade, se rend à Dieppe. En son absence, il laisse le Commandement au Cap. Gay Officier-Adjoint.
En prévision d'un encerclement par l'ennemi du massif des Htes Charrières par les couloirs compris entre ce massif et Fromezey d'une part, l'étang de Braux d'autre part, le Général Cdt la 28° Brigade donne l'ordre suivant :
"Deux compagnies sont mises à la disposition du Colonel de Senilhes, qui les établira à proximité du réduit des Htes Charrières, de manière à garnir, le cas échéant, les lisières S.0 et NO. des Htes Charrières prenant ainsi en flanc l'ennemi qui voudrait  utiliser les couloirs en question.
D'autre part, le Lt Colonel de Senilhes agira directement au moyen de ses compagnies d'Haraigne pour boucher l'intervalle entre la lisière Sud des Htes Charrières et Fromezey"
Le Lt Colonel, aussitôt après son retour (2h40) ajoute à cet ordre diverses mesures d'exécution notamment pour orienter les deux Compagnies qui doivent se rendre aux Htes Charrières, il désigne le Cap. Gay et la Cap. Brunhold l'un devant servir de guide dans la direction du N.O., l'autre dans la direction du saillant S.O. du bois.
Les deux Cies du 42°arrivant à Haraigne à 4 heures. Elles sont sous le commandement du Cap. Pérès.
Dans l'intervalle, un soldat allemand faisant partie d'une reconnaissance de 50 hommes, qui s'était avancée jusqu'à la tête de porc (avancée Est du bois) est pris dans la zone intérieure des réseaux.
C'est un homme du 6ème de Réserve. On le conduit à Dieppe.
Le Général s'étonne qu'il ait pu impunément franchir les réseaux. On lui explique, après enquête faite à la G.G.2., que ce soldat est tombé dans un piège, tendu à l'ennemi en cet endroit par un de nos petits postes.
Les deux Cies actives, guidées par les deux officiers orienteurs, se rendent au bois. A 6h45 leur mouvement est accompli et elles sont en place.
En ce qui concerne le bombardement, la situation est inchangée. il est lent et continu, avec quelques périodes de détente. vers 9 heures il reprend avec intensité. L'ennemi parait procéder par rafales de 5 à 10 minutes, suivies de silence.
a 9 heures, on reçoit de la Brigade cette instruction : "Le Général Chretien vous informe que, d'après les dires de certains déserteurs, l'ennemi a l'intention d'attaquer aujourd'hui même le bois des Htes Charrières de front et aussi sur ses deux flancs."
"il recommande d'exercer une surveillance très active et que tout le monde soit à son poste de combat pour repousser vigoureusement toute attaque"
Se tenir prêt à prévenir l'artillerie pour qu'elle puisse déclancher ses tirs de barrage
Employer les fusées rouges concurremment avec autres liaisons....etc....." 
Pendant toute la matinée, la situation demeure inchangée.
Ce qui caractérise ce bombardement généralisé, c'est toujours l'alternance de rafales et des silences.
Mais le point le plus violemment battu depuis quelques heures, c'est le lieu dit Tête de porc (avancée Est des Hautes Charrières)
y compris les tranchées 10,13,14 et 15).
On peut craindre une attaque de ce côté là. Le Cdt Boulanger recommande à la fraction qui occupe la tranchée 36 (lisière N.O. des Htes Charrières) de tenir bon plus que jamais et surtout de rester en liaison avec le 42° A. posté à la digue de l'étange d'Haraigne.
À 12 heures, Fromezey est survolé par un avion. Le tir redevient intense sur "23" ce qui parait confirmer l'hypothèse de l'intention allemande de tourner sur le flanc Sud.
À 13 heures, Haraigne est l'objet d'un tir de démolition. La ferme est d'ailleurs allégée de la moitié de son personnel réparti d'avance dans les tranchées.
À 14h20, le Lt Colonel, consulté par le Cdt Boulanger l'autorise à faire procéder à la relève de l 7ème Cie par la 9ème Cie. Cette opération s'effectuera pendant la nuit. 
C'est à 16h50 qu'éclate le "Trommelfeuer" (NDA pilonnage), feu roulant d'artillerie précurseur d'une attaque d'infanterie, sur le G.G.2 et Fromezey. Interrompu de 17h9 à 17h15, il reprend sans aucun ralentissement jusqu'à 17h50.
à 17h15, le Centre des Htes Charrières prévient le Colonel que la Section de Mitrailleuses de la Tranchée 5 est signalée détruite. La Brigade en est avisée.
À 18H35, rapports sur le "Trommelfeuer" : "une fois le cyclone passé, silence et calme".
La G.G.2 signale une fusillade du côté de Megeville. Fromezey n'en signale aucune. La G.G.2 reste sur le qui-vive; elle demande même un tir de barrage devant la tranché 25 ; il lui sera accordé : une attaque d'infanterie semblant se déclencher à la lisière du bois. Un tir de barrage est également exécuté devant Fromezey.
Le reste de la nuit s'écoule sans incident notable.
Travaux - Les travaux de réparation sont poussés activement cette nuit-là. Le Lt Colonel adresse au P.C. 28° Brig. le tableau récapitulatif suivant des dégâts constatés : 
Centre de Fromezey-Réseaux Est et Nord brêches de I à I2 mètres en partie réparées avant ce compte rendu.
Centre des Htes Charrières. Tout le réseau de Ière ligne est endommagé sur la lisière N.E. surtout à l'avancée (tête de porc)
les réseaux de la 2ème ligne de la Ière position ont seulement quelques brêches entre 33,34 et 35.
Centre de Braux : pas de brêches, mais des dégâts entre 39 et 37.
Centre d'Haraigne. pas de dégâts aux réseaux.
Le matériel nécessaire demandé hier arrive dans la nuit à Hariagne Fromoezey et Braux.
Un dépôt du Génie se constitue, par ordre de la Brigade, à la ferme Haraigne : 12.000 sacs à terre, 4500m. de réseaux Brun, 200 éléments Lagarde.
Comme personnel technique, une section du Génie est demandée par le Cdt Boulanger pour réparer les réseaux de Ière ligne au bois des Htes Charrières ; deux équipes de Sapeurs-Pompiers sont dirigées par le Lt Fizelier sur la Tranchée 5 et la 23 pour y faire une banquette de tir. Un caporal et 2 hommes sont envoyés à Fromezey.
Téléphone et liaison optique ; ordre 76/3 de la 14° Division "il faut procéder à la vérification constante du téléphone; y suppléer par la liaison optique et se servir des coureurs comme moyens de transmission plus pratique"
Ravitaillement
Les troupes peuvent renouveler leurs vivres de réservé grâce aux dépôts constitués dans les centres. D'ailleurs le ravitaillement quotidien a pu s'effectuer malgré le bombardement ; les cuisines ont été installés à proximité des G.G. et les hommes ont des aliments chauds bien qu'à des heures irrégulières.
Accident à Fromezey. Un obus détruit le dépôt de ce centre à 11 heures (138 kgs de viande de conserve, 37K de sucre, 17 K de café, 18 K de pain de guerre), le Lt Colo. prévient le Cap. Major, demeuré à Damloup, qu'il serait urgent de faire remplacer ce dépôt. L'opération aura lieu pendant la nuit.
Mesures du Sce Santé et Pertes. Les hommes, dans les centrs attaqués par les gaz (Braux, Htes Charrières) sont munis d'un double jeu de ....  (ordre  4074/3 de la 14° D.I.).
La question de l'évacuation des blessés fait l'objet d'un message  du Lt Colo. au Med. Chef à Damloup. La voiture médicale d'Haraigne a été brisée par un obus ; il faut envoyer des voitures pour blessés couchés et assis., les moins atteints rejoindront à pied la route d'Abaucourt.
A la fin de la nuit du 22 au 23, à 6 heures les pertes connues pour les 4 Centres sans distinction de corps sont de I6 tués et 53 blessés.
Journée du 22 seule : 15 tués 42 blessés, I disparu.



samedi 25 août 2018

EXTRAIT du Journal de Guerre du 44ème R.I.T. (Régiment d'infanterie terriroriale)

PRÉCISIONS SUR LE 44ÈME R.I.T

"Ce régiment dit Régiment de Verdun, composé de meusiens et de parisiens a tenu le front des 1ers jours d'août 1914 au 4 mars 1916, avant d'être envoyé sur la Voie Sacrée, sans désemparer. Développé sur un front de 3 kilomètres en 1ère ligne le 21/2/1916 entre Fromezay, le bois des Hautes Charrières et l'étang de Braux, devant Dieppe, la ferme Haraigne et Damloup, eux même devant les forts de Douaumont et de Vaux, ce régiment a supporté les préliminaires de l'offensive allemande du 25/2 à 7 heures du matin".  


Bataille de Verdun :

21 février 1916

"à 7 heures du matin, au début du bombardement de notre secteur par l'ennemi, le Lt Colonel de Senilhes quitte Damloup

 


pour venir prendre à la ferme Haraigne le commandement des quatre centres de résistance qui lui sont confiés.





Le Général Lacotte, Commandant la 28ème Brigade a son PC à Dieppe (Meuse), le colonel Bertrand Commandant la 212 ème Brigade est auprès de lui. 

Disposition des troupes. Conforme à l'ordre du Général Cdt la 28ème Brigade en date du 20 février 1916.

I - Le Centre d'Haraigne ou tiennent garnison la 2ème Cie du 44 RIT et la 1ère Cie du 42èA. Le Capitaine Gay ne prendra le commandement de ce centre que le soir, à 19 heures.
II - Centre de Fromezey ou G.G.I. sous les ordres du Capitaine Mimil, est occupé par la 8ème Cie du 44 RIT et dans la soirée, vers 20 heures renforcée ar la 10ème Cie qui était en cantonnement de repose à Soupleville. Une heure après le Commandant Robin, du 3ème Bataillon 44 RIT

qui était arrêté à Haraigne pour recevoir des instructions du Lt Colonel arrive à son tour au village et y prend le commandement de ce centre.
III - Le Centre des Hautes Charrières est sous le commandement du Cdt Boulanger dont le Bataillon est aux Avant postes depuis le 17 Fev. Le Cdt Boulanger a sous ses ordres la G.G.2 (Htes Charrières Sud) qu'occupe la 7ème Cie, la G.G.3 (Htes Charrières Nord) qu'occupe la 6ème Cie, le Réduit, où se trouve la 4ème Cie, ainsi que la 8ème Cie du 42è A, dite Cie de centre, attaque (Lieutenant de Vauchier; la Réserve où se trouve la Ière Cie.

Vers  20 heures, malgré le Bombardement, la 9ème Cie, jusqu'alors en cantonnement de repos à Souppleville, vient, sans aucune perte renforcer la Réserve.
IV- le Centre de Braux ou G.G.4, sous le commandement du Cdt Bauer (1er Bataillon 44RIT) comprend la 5ème Cie placée au petit bois de Braux, et la IIème Cie au grand bois de Braux. A noter que la 3ème et la 12ème du 44 RIT sus le commandement, ce jour-là, du Colonel Engelhard Cdt le 42° A, sont chargés avec les Cies du Cdt Latour du secteur de Dieppe, elles occupent les tranchées à l'Est de Dieppe.

Les sections de mitrailleuses du 44°RIT (Capitaine Brunhold) occupent les emplacements suivants :
Une section à la Tranchée I
Une -     à la tranchée 5-dites Léonard) 
Une -     à la tranchée 10 dites (Htes Charrières
Une -     à la tranchée 15 (          d°
Une -     à la tranchée 16 (          d°
Une -     à la tranchée 2  ( Fremezey Sud)
Une -     à la tranchée 6  d° N.E.)

Evénements Le bombardement commencé vers 6 heures sur Dieppe, la lisière Nord des Htes Charrières et Fromezey se généralise et s'intensifie. Haraigne est l'objet d'un tir de barrage. À 10h50 des obus suffocants tombent sur les Htes charrières Sud (GG2) et Nord (GG3), sur Braux (GG4).
À Fromezey pas de gaz, mais des obus de gros calibre (150 au moins). à 11heures, les fusants ennemis arrosent le rectangle compris entre Fromezey à l'Est, la route de Verdun-Etain au Sud, Breveille à l'Ouest, lisière Sud des Htes Charrières au Nord.
 À midi, le rectangle est plus calme, c'est le tour des Htes Charrières Nord et de Braux. À LA GG4 (Braux), l'air est saturé d'éther et de chlorure de benzyle.
Vers Midi 30, accalmie sur ces positions, mais Haraigne et le boyau en ses points d'insertions dans la ferme et dans le bois sont activement bombardés.
Le téléphone entre Braux, Fromezey, le bois des Htes Charrières et le PC du Lt Colonel à Haraigne est coupé et réparé sans cesse.
Dans l'après-midi, les Htes Charrières souffrent plus particulièrement d'obus suffocants. La 8ème Cie du 42° A, dite Cie de contre-attaque, malgré les masques est éprouvée par les gazs; il y a heureusement deux dépôts de masques : environ 200 au poste de secours du bois et 400 à Haraigne.
À 14 heures, la Tranchée 23, à l'Ouest de Fromezey est écrasée d'obus de 210 et le bombardement de Fromezey reprend. C'est la violence de ce bombardement qui oblige le Lt Colonel de Senilhes à transformer ce jour la relève régulière de la 8°Cie par la 10° en réserve (odre conforme à l'instruction du Général Cdt La 28° Brigade).
À 13h30, conformément à l'ordre 3C8/3 de la 28° Brigade, le Lt Colonel invite les Cdts des Centres à ce que, dans leurs compte-rendus de bombardement, ils tâchent de spécifier le caractère du tir ennemi : réglage barrage, tir de démolition/ou d'attaque, bluff pour donner le change, etc..le tir de démolition est constaté dans tous les comptes rendus; les directions sont repérées : il vient de Tilly, de Gincrey, de Rouvres, du Behaut, du Penard.
Le corps d'Armée, par l'intermédiaire de la 28° Brigade, fait connaître au Colonel que, d'après des renseignements concordants, l'ennemi aurait l'intention de contourner le bois des Htes Charrières, par Braux et par Fromezey au lieu de l'attaquer de front. Le Général Lacotte écrit au Colonel "il faut que vos deux places des Htes Charrières soient fortement tenues pour empêcher l'ennemi de la tourner".
"Le Colonel ne devra pas de contenter de dépôt de matériel (fil de fer en particulier) au point terminus de la voie normale dans le bois.
Chaque Centre devra répondre de son mieux, étant donné les circonstances, au questionnaire envoyé à 18h25 par le Général de Brigade : 
I - quels sont les points ou les brêches ont été faites dans les réseaux ?
II - Quelle en est la nature ?
III Quelles sont les dimensions de ces brêches ?
IV - Si vous n'avez pas les matériaux, on vous les fera venir, et où peut-on les apporter.
Devant les premiers comptes-rendis hâtivement faits pendant le bombardement, le Lt Colonel se décide à faire demandé immédiatement : 1000 piquets en tire-bouchon pour Braux, 1000 pour Haraigne, et I tonne de fil barbelé, soit 700 kgs pour Hariagne et 300 pour Braux.